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HOMELIE

26 novembre
année 2022-2023

Année A - Christ, Roi de l’univers - (26/11/2023)
(Ez 34, 11-12.15-17 – Ps 22 – 1Co 15, 20-26.28 – Mt 25, 31-46)
Homélie du F. Jean Louis

Frères et sœurs, Ce dimanche, dernier dimanche de l’année liturgique, nous célébrons la solennité du Christ Roi de l’univers. Cette fête a une tonalité eschatologique, c’est-à-dire qu’elle nous annonce la fin des temps et l’ouverture des temps nouveaux du règne du Christ sur l’univers entier. Mais en quoi consiste la royauté du Christ ?
Les termes de roi, de royauté sont évidemment très connotés dans notre culture. De la royauté absolue de droit divin de l’ancien régime aux monarchies constitutionnelles d’aujourd’hui, il y a une marge qu’il n’est pas facile d’appréhender. Et nous risquons toujours de projeter sur Dieu une réalité politique dont nous n’avons plus l’expérience en ce 21e siècle débutant, mais dont les souvenirs sont, il faut le dire, mitigés.
Et pourtant, la Bible nous dit que le Seigneur est roi, les psaumes le redisent plusieurs fois. Le Christ lui-même, interrogé par Pilate, dira bien « je suis roi, mais ma royauté n’est pas de ce monde. » Quelle est donc cette royauté ? Les lectures de ce dimanche nous donnent des ouvertures qu’il me semble important d’examiner. Le prophète Ezékiel, à l’époque de l’exil à Babylone, au sixième siècle avant le Christ, nous présente le Seigneur prenant en compte la situation de son peuple déporté. Il n’a plus de roi, ceux-ci ont d’ailleurs failli dans leur rôle. C’est désormais Dieu qui veillera sur son peuple. Mais il ne le fera pas comme les rois humains. Il veillera comme un berger s’occupe de son troupeau. Il ira délivrer ses brebis dispersées, rechercher la brebis perdue, ramener l’égarée, rendre des forces à la brebis malade. C’est cela qu’auraient dû faire les rois d’Israël s’ils avaient écouté leur Dieu. Le Seigneur délivrera finalement son peuple de l’exil, le ramènera sur sa terre et le fera paître selon le droit, ce que n’avaient pas fait la plupart des rois que le peuple s’était choisis. Le roi selon Dieu n’est pas selon nos représentations humaines. Toutefois, Ezékiel annonce que Dieu, comme roi, sera aussi un juge…
Le psaume 22 qui a été chanté nous redit combien le Seigneur est un berger. Or, nous le savons bien, le Christ, Fils du Père qui s’est fait chair, s’attribuera le titre de berger des brebis. Et le psaume termine dans la confiance proclamée en un Dieu qui procurera le bonheur pour les jours de la vie. Le roi berger de son peuple qu’est Dieu est bien celui qui veut le bonheur de son peuple.
Le passage de la première épître aux Corinthiens choisi pour cette célébration nous présente une grande fresque de la fin des temps avec la résurrection des morts qui recevront la vie dans le Christ. Et ce dernier remettra son pouvoir royal au Père, après avoir anéanti la mort. Et Dieu sera tout en tous.
Quant à l’évangile, il nous présente lui-aussi d’une autre façon la fin des temps, l’eschatologie, sous la forme du Jugement dernier qui a tellement marqué notre culture, notamment dans l’art. Remarquons que ce jugement ne porte pas sur les pratiques religieuses mais bien sur l’attention aux plus pauvres, assimilant ces derniers au Christ. « Tout ce que vous aurez fait, ou n’aurez pas fait à l’un de ces plus petits, c’est à moi que vous l’aurez fait ou pas fait. »
Remarquons aussi que la même réaction des bénis et des maudits les sauve ou les condamne. En effet, les deux n’ont pas reconnu le Christ dans les plus pauvres. Mais les bénis sont venus en aide aux pauvres, non pas parce qu’ils y ont vu le Christ, non pas pour obtenir des mérites, mais par pure bonté gratuite. Par contre les maudits, eux, n’ont pas reconnu avoir manqué aux devoirs élémentaires de nourrir les affamés, accueillir l’étranger, visiter le malade, etc… et c’est cela, à mon avis, qui les condamne. Si leurs yeux s’étaient ouverts, s’ils avaient reconnu leur erreur, alors, tout aurait pu être possible. Nous trouvons en effet dans la première épître de saint Jean : « Si nous reconnaissons nos péchés, Dieu qui est fidèle et juste va jusqu’à pardonner nos péchés et nous purifier de toute injustice. Voilà la justice de Dieu. Une certaine spiritualité a insisté sur ce côté implacable du jugement de Dieu, espérant sans doute faire peur et amener le pécheur à se convertir, mais est-ce que cela n’a pas eu comme conséquence, outre d’écarter nombre de chrétiens de la foi, d’avoir fait oublier la responsabilité que nous avons dans ce jugement ? Refuser de reconnaître leur manque d’amour, n’est-ce pas cela qui a condamné les boucs ? N’est-ce pas cela l’enfer ?
Frères et sœurs, que nous disent ces textes sur la royauté de Dieu ? Eh bien que, comme le Christ le dira à Pilate, vraiment, la royauté de Dieu n’est pas de ce monde. Quand Dieu se montre comme roi, il se montre comme un berger particulièrement attentif aux plus fragiles, aux plus pauvres. Et lorsque le Christ se dit roi, c’est dépouillé devant Pilate, mais à la veille de sauver http://www.apqv.fr/admin/images/retour.gifl’humanité par une mort acceptée sans violence et sans révolte. C’est sa faiblesse, ou plutôt ce que nous considérons comme de la faiblesse, qui, finalement, anéantit la puissance apparente de la mort. Dieu, ne cesse de prendre à contrepied nos représentations toute faites. Nous imaginons la toute-puissance de Dieu de façon destructrice, à notre image peut-être, et Dieu vient se révéler en un homme soumis aux aléas de l’histoire, des calculs politiques et des raideurs religieuses.
Si nous avons tendance à voir dans la Solennité du Christ roi de l’univers, une manifestation de puissance, n’oublions pas que la puissance de Dieu, qui est réelle, ne se manifeste pas comme la puissance humaine, finalement d’autant plus fragile qu’elle veut se montrer forte. Car la faiblesse de Dieu, c’est elle qui vainc la souffrance et la mort.
Si nous avons tendance à voir Dieu comme un juge impitoyable qui condamne sans pitié, n’oublions pas qu’Isaïe le prophète disait déjà en son temps que la justice de Dieu est une justice qui rend juste, qui justifie, et saint Paul reprendra cela. Encore faut-il se laisser justifier… reconnaître que nous avons radicalement besoin d’être justifiés, rendus justes par le jugement de ce roi miséricordieux qu’est Dieu.
La Solennité du Christ roi de l’univers, par la méditation des textes que la liturgie nous offre, nous invite à grandir dans la connaissance du vrai Dieu et pas de l’image que nous nous faisons de lui. A la fin de cette année liturgique et au seuil de la nouvelle année liturgique qui débutera dimanche prochain, laissons-nous être bousculés pour grandir dans la connaissance d’un Dieu qui, décidément, nous surprend toujours.
AMEN

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