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HOMELIE

01 mai
année 2021-2022

Année C - 3° Dimanche de Pâques - 1° mai 2022
Actes 5,27…41 / ps 29 ; Apocalypse 5, 11-14; Jean 21, 1-19
Homélie du F.Basile

Frères & Soeurs, nous sommes à la fin du 4° évangile, un chapitre rajouté mais tellement précieux : c’est la 3° fois que Jésus ressuscité se montre à ses disciples, mais là ce n’est plus à Jérusalem, c’est en Galilée au bord du lac, là où l’aventure avait commencé ; et c’est là que tout recommence, que tout peut recommencer, et avec Jésus, c’est l’amour qui gagne. Voilà sans doute le sens de Pâques dans notre vie. En tout cas, c’est ce qui se passe dans le cœur de Pierre ce jour-là. « M’aimes-tu ? Suis-moi »
Mais Pierre n’est pas seul ; on nous dit qu’ils étaient sept, un chiffre qui exprime une plénitude ; ils sont tous nommés, sauf deux : n’est-ce pas pour que chacun de nous se retrouve dans l’un de ces deux disciples anonymes partis pêcher avec Pierre ? Ils n’ont rien pris cette nuit-là, mais le contraste n’en sera que plus fort, lorsque cet inconnu les appelle sur le rivage et leur dit : « Jetez le filet à droite et vous trouverez » Alors tout va changer, non seulement ils trouvent du poisson en abondance, mais surtout ils retrouvent celui qu’ils avaient perdu, ce Jésus qui les avait entraînés, 3 ans durant, sur les routes de Palestine et qui avait fini misérablement sur une croix, abandonné de tous ou presque, trahi par Pierre lui-même. Aussi quand le disciple bien-aimé s’écrie : « C’est le Seigneur ! », le cœur de Pierre en est retourné, il se jette à l’eau. Pourtant Jésus ne lui dit rien ; tout se passe presqu’en silence dans une intensité d’amour qui les bouleverse tous. « Aucun n’osait lui demander : ‘Qui es-tu ?’ car ils savaient bien que c’était le Seigneur. »
Mais le plus étonnant de cet évangile, c’est la suite, c’est l’entretien de Jésus avec Pierre ; il aurait pu lui dire : «Viens, je te pardonne » non, il lui pose une question où la confiance est en jeu : « Pierre, m’aimes-tu ? » Il y a des paroles de l’Evangile qui nous remettent debout, et celle-ci en est une. Je souhaite à chacune, à chacun de vous de l’entendre ce matin. Pourquoi Jésus pose-t-il la question 3 fois, jusqu’à contrister le cœur de son ami ? Mais c’est l’histoire de Pierre : 3 fois il avait trahi l’amour ; 3 fois, Jésus lui permet de redire son amour.

Vous savez que dans le texte original en grec, il y a 2 verbes différents pour dire « aimer » : agapein et philein, aimer, aimer vraiment : les 2 mots sont nécessaires pour dire l’amour avec tout un va et vient entre les 2 : agapein, c’est l’amour parfait, l’amour qui vient de Dieu, l’amour qui va jusqu’au bout en donnant sa vie, et puis philein, c’est l’amour d’amitié, un amour fort entre 2 êtres, un amour plein d’humanité et de tendresse. On a l’impression que Pierre dit à Jésus : « Je t’aime de toute mon amitié d’homme », mais il n’ose pas aller plus loin, et Jésus lui repose la question : « Pierre, m’aimes-tu maintenant de cet amour qui est capable d’aller jusqu’au bout en donnant sa vie ? » Et non seulement Jésus lui repose la question, mais il fait grandir cet amour : « Si tu m’aimes vraiment, pais mes brebis, prends soin de mon Eglise. » Oui, Jésus par cette triple question redonne à Pierre sa confiance. Tout peut recommencer. C’est cela Pâques, cette rencontre du Christ ressuscité, et là nous sommes tous concernés.

Si nous regardons nos vies d’hommes et de femmes d’aujourd’hui, nous savons qu’elles sont traversées de temps à autre par des trous noirs, des nuits sans étoiles, des brouillards – et les moines ne sont pas à l’abri de ces pannes – on le vit parfois sur le plan météo ; plus profondément on le vit quand dans une vie d’homme ou de femme, quelque chose se casse, un être cher disparaît, une relation d’amour se brise – la faute à qui, on ne sait pas très bien, mais aucun des 2 ne veut pardonner à l’autre et c’est l’échec : foyer brisé, situation bloquée… et voilà que tout va changer, on ne sait pas comment : la vie ordinaire avait repris, morose, triste ; et c’est là précisément que la résurrection de Jésus rejoint notre vie comme elle a rejoint au lever du jour les disciples rentrant de la pêche.
Ce n’est pas un coup de baguette magique ou un coup de chance comme on gagne au loto, c’est un acte de foi. Le chrétien, c’est celui qui croit à la résurrection de Jésus ; il croit qu’elle peut changer toute sa vie, elle est pour lui le signe que l’amour est plus fort que la mort, que le pardon est possible et que l’avenir est ouvert. C’est là qu’il nous faut accueillir la question de Jésus : « Pierre, m’aimes-tu ? » et lui répondre : « Je t’aime, tu le sais » ; c’est lui offrir comme Pierre toute notre vie avec ses échecs, ses ratés, ses trous noirs dans un geste de confiance qui appelle et suscite l’amour.
Jésus, à la réponse de Pierre, ose lui confier la charge de ses frères, la charge de la communauté, de l’Eglise. Quelle confiance Dieu fait ainsi à l’homme ou à la femme, à chacun de nous lorsqu’il lui confie une mission !
C’est vrai que nous ne savons pas aimer comme il faudrait, mais si nous le reconnaissons, et si nous essayons d’aimer, comme il est écrit sur la tombe de l’abbé Pierre : « Il a essayé d’aimer », alors nous pouvons dire au Seigneur : « Tu sais tout, tu sais combien je t’aime », et tout devient possible : le Christ ressuscité peut rejoindre nos vies. Il est là ce matin dans cet évangile proclamé, il est là dans notre communauté rassemblée pour rendre grâce : avec lui et dans l’Esprit, nous allons pouvoir chanter l’agapé de Dieu, l’amour du Père.
Frère Basile

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