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HOMELIE

07 novembre
année 2020-2021

32e dimanche Temps Ordinaire (B) (07/11/2021)
(1 R 17, 10-16 – Ps 145 – He 9, 24-28 – Mc 12, 38-44)
Homélie du F.Jean-Louis

Frères et sœurs, Ce dimanche, la première lecture et l’évangile ont un personnage commun : une veuve, veuve dont le psaume 145 qui a été chanté nous dit qu’elle est soutenue par le Seigneur, ainsi que l’orphelin.
La veuve, l’orphelin et l’immigré sont les trois catégories de pauvres les plus caractéristiques dans la Bible. La veuve et l’orphelin car ils ne disposent plus de la protection d’un mari, d’un père, et l’immigré, parce qu’il n’est plus sur sa terre et est étranger, sans repères culturels, familiaux et amicaux, avec tout ce que cela comporte de fragilité, nous le savons bien.
L’épisode de la veuve de Sarepta ne peut se comprendre que s’il est resitué dans la longue lutte du prophète Elie contre l’introduction de cultes païens en Israël, sous l’influence de la reine Jézabel, épouse du roi Achab. Ces dieux étaient censés favoriser la fertilité des sols grâce à la pluie dont ils étaient les maîtres. Elie va répliquer en annonçant une grande sécheresse de la part du Seigneur afin de montrer la supériorité de celui-ci sur ces dieux païens et c’est ce qui va arriver. Poursuivi, Elie se réfugie en terre païenne où il est accueilli par une veuve pauvre et son fils. Cette veuve va donner, partager tout ce qu’elle a et se verra comblée par le Dieu vivant, alors que les Israélites, eux, continueront à subir les privations causées par la sécheresse. Bien que païenne, elle a cru à la parole du prophète et a été récompensée.
D’une pauvre veuve, il est aussi question dans l’Evangile de ce jour. Le Christ vient de recommander aux foules de se méfier des apparences, en l’occurrence ici des scribes qui aiment les tenues d’apparat, les honneurs. Dans l’apparence, ils semblent impeccables, fervents, mais en fait, ils dévorent les biens des veuves, personnes les plus démunies face à ce genre de rapacité. Mais voilà qu’alors que le Christ est devant la salle du trésor du Temple et qu’il regarde des riches y mettre des grosses sommes, une pauvre veuve vient mettre deux pièces de monnaie. Le Christ déclare alors qu’elle a mis plus que tous les autres. Quel contraste pour des gens qui pensaient que les riches étaient riches par bénédiction de Dieu ! Nous voyons bien que ses critères à lui, les critères de Dieu, sont bien différents des critères de la société d’alors et sans doute d’aujourd’hui.
De la veuve de Sarepta, il sera question dans l’évangile de saint Luc, au chapitre 4, lorsque Jésus se retrouve dans la synagogue de Nazareth, lieu de sa jeunesse. Et ça tourne mal pour le Christ. Ce dernier, en effet, déclare que lors de la fameuse famine du temps d’Elie, le prophète avait été envoyé, non pas aux veuves d’Israël, pourtant nombreuses, mais à une veuve étrangère, de la ville de Sarepta, au pays de Sidon, et donc à une païenne. C’en est trop pour les personnes réunies dans la synagogue qui, alors qu’elles venaient de louer le message de grâce venant du Christ, veulent maintenant précipiter Jésus en bas de la colline. Revirement subit car il était impensable pour eux qu’un prophète soit envoyé à une païenne alors qu’Elie venait de lutter contre une autre païenne, reine celle-là : Jézabel. Là aussi, nous voyons combien les critères de Dieu ne sont pas les nôtres.
En effet, ces textes nous montrent bien que le Dieu d’Israël, qui est le Dieu de Jésus Christ, sort des catégories et des conventions socialement et religieusement reçues. C’est une veuve païenne qui accueille Elie et lui donne tout ce qu’elle a. C’est elle qui est l’objet de la bénédiction de Dieu en étant nourrie au jour le jour, comme Israël avait été nourri au Désert. Dieu ne réserve pas sa Grâce à un peuple mais s’il s’est choisi un peuple, c’est pour ensuite choisir toutes les nations.
Et cette pauvre veuve de Jérusalem, une juive celle-là, se retrouve être admirée par le Christ, admirée par Dieu, alors que son geste, matériellement, est minime. On voit bien que le Christ, sans mépriser les riches (les épisodes de Zachée et de l’appel de Matthieu le montrent bien) pose son regard sur les plus pauvres les moins considérés de son temps.
Fort bien. C’était dans l’Antiquité et dans le monde juif. Mais pour nous aujourd’hui ?
La société prend soin des veuves ainsi que des orphelins. Ce serait quand même à voir de près car le nombre de pauvres dans notre société occidentale dite riche n’est pas négligeable, nous le savons bien. Et bien des mères élevant seule leurs enfants sont dans la pauvreté.
Et puis, il y a les immigrés, question brûlante et combien dérangeante. Alors que l’Eglise a pu montrer sa face sombre, nous ne le savons que trop, certains chrétiens posent des actes forts et clairs pour soutenir les immigrés traités de façon inhumaine par une société qui se veut égalitaire et fraternelle. Bien sûr, le discernement sur ce qu’il y a lieu de faire n’est pas toujours évident. Mais les prophètes et le Christ lui-même n’ont-ils donc pas été souvent incompris dans leurs paroles et leurs actes ?
Depuis 2000 ans et la venue du Christ, il y a certainement eu des progrès réalisés dans notre monde quant à la dignité des personnes. Mais ne fermons pas les yeux trop facilement sur les situations gênantes. Admettons que notre regard sur les plus petits de notre monde est parfois très loin de ce que le Christ nous enseigne, de ce que sa conduite nous dicte.
Il ne s’agit pas de nous mettre sur la paille pour aider les autres, ce serait une façon trop commode de trouver des arguments pour ne rien faire. Mais, au nom de notre foi, quels gestes, si petit soient-ils, quelles collaborations pouvons-nous mener pour aider ceux qui en ont besoin à se prendre en main ?
Frères et sœurs, nous arrivons à la fin de l’année liturgique et les évangiles nous redisent les enjeux concrets de notre foi. Ce dimanche, il s’agit de contempler le regard de Dieu qui se porte sur les gens démunis qu’ils soient païens ou juifs. Le Christ nous invite à porter nous-mêmes sur les plus démunis ce même type de regard. C’est certainement impossible par nos propres forces mais en nous laissant travailler par sa Parole et en recevant son Corps, nous pouvons laisser l’Esprit Saint opérer en nous bien plus que nous ne pouvons imaginer. AMEN

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