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HOMELIE

03 mai
année 2019-2020

Année A - 4e dimanche après Pâques (2020, communauté seule)
Actes 2, 36-41 ; I Pierre 2,20-25 ; Jean 10, 1-11
Homélie du F.Ghislain

Dans l’évangile, Jésus nous a dit, une fois de plus : « Je suis la porte ». Toute porte libère un passage, elle ouvre sur une route à prendre, sur un espace à occuper. Pour nous, moines, la route est un chemin vers Dieu, l’espace où entrer est Dieu lui-même. La phrase de saint Benoît a touché nos cœurs : « chercher Dieu » dans cet espace physique et dans cette communauté humaine. Nous écoutons en ce moment au réfectoire les propos monastiques du cardinal Hume, tout à fait classiques mais qui peuvent nous toucher nous aussi. Il disait : « la vie monastique est avant tout une quête de Dieu…la finalité de tout est la quête de Dieu… L’intimité avec Dieu, c’est ce à quoi tout le reste nous mène et dont tout devrait déborder… »
Ces propos répétés me rappellent ce que nous disait le père abbé Fulbert, à trois jours de sa mort à Noël 1948 : « Restez recueillis en Dieu » ; ou encore ils font écho à une résolution écrite par le père abbé Placide sur un papier retrouvé après sa mort en 1952 : « élans secrets d’amour qui montent vers Dieu, tel qu’il est en Lui-même. Dieu aimé pour lui-même ». Le cardinal Hume parlait « d’instinct monastique », ce qui rappelle la formule de saint Thomas parlant de « l’instinct intérieur de la foi ». Chacun de nous l’a reçu, cet instinct, autrement il ne serait pas ici. Intérieur et invisible (saint Augustin disait : plus intime à nous que nous-mêmes) il nous maintient attachés les uns aux autres. En ce temps de virus, on peut dire qu’il nous a contaminés, il nous contamine ; loin de chercher un vaccin, nous sommes invités à le laisser peu à peu nous coloniser totalement, afin qu’il soit le lien indestructible de notre être ensemble : « la quête de Dieu en communauté », dit encore Basil Hume.

Je suis la porte, il faut donc la passer. Mais il faut aussi penser ce passage afin de bien le prendre. Aujourd’hui, dans la seconde lecture, saint Pierre nous dit comment : « Il vous a laissé un modèle afin que vous suiviez ses traces ». Quelle trace ? Celle de celui qui a « supporté la souffrance pour avoir fait le bien ». De même que l’image de la porte nous ouvrait sur Dieu, de même elle nous indique la patience, la Passion du Christ. Et de même que ce texte pouvait évoquer en nous le « S’il cherche vraiment Dieu » de la Règle, de même il nous fait penser à la mystérieuse formule qui suit dans le texte du chapitre 58 : « s’il est soucieux d’opprobres ». Le père Adalbert adoucit le dernier mot en traduisant : « de pratiques d’humilité ». Quoi qu’il en soit, en reprenant l’expression du cardinal Hume, on pourrait dire : de même qu’il y a un instinct monastique qui nous pousse vers Dieu, de même il y en a un, - et c’est sans doute le même, - qui nous pousse vers l’humilité. C’est au niveau de cet instinct que nous pouvons entendre le père Muard : « pauvre, humble, mortifié ». Au réfectoire encore, nous avons entendu quelque chose de cela dans l’évocation du Père Ceyrac, particulièrement au moment où il retourne en Inde après les années passées au Cambodge. A ce moment-là, on pourrait dire qu’il est désormais « de trop » : on a du mal à lui trouver une chambre, ce n’est plus pour lui le temps des initiatives puissantes, il appartient à un passé dépassé, il n’a pas de futur. Plusieurs fois, à cette époque, il note comme à regret sur son carnet qu’il ne laisse rien derrière lui : pas, comme l’abbé Pierre, les fondations d’Emmaüs, pas comme Mère Teresa, une congrégation de sœurs de la Charité. Rien. Alors, un jour, il se lève, fait sa toilette, se coiffe soigneusement, puis il s’étend et il meurt, tout dispos pour passer par la porte, Jésus qu’il aimait. Pauvre, humble, mortifié.

Je crois que nous, ici à la Pierre qui Vire, cette trentaine d’hommes que nous sommes, en communion avec nos frères du Vietnam, de Madaga scar, du Burundi, nous vivons de ce double instinct, instinct de Dieu qui nous attire et nous pousse vers l’invisible, instinct d’humilité qui nous fait, comme dit un texte de saint Paul lu à Laudes la semaine dernière, chercher à « le connaître, la puissance de sa Résurrection, la communion à ses souffrances ». Pas plus que saint Paul, nous n’y sommes arrivés, mais « oubliant ce qui est en arrière et tendus vers l’avant, nous courons vers le but », la communion avec Dieu dans le Christ avec tous nos frères les hommes. Ainsi soit-il

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