COMMENTAIRES
SUR LA REGLE DE SAINT BENOIT
EN QUEL ORDRE FAUT-IL DIRE CES PSAUMES ?
22. Par dessus tout, nous donnons cet avertissement : si quelqu'un n'aime pas cette distribution des psaumes, qu'il établisse une autre ordonnance, s'il la juge meilleure,
23. pourvu qu'il maintienne absolument la psalmodie intégrale des cent cinquante psaumes du psautier chaque semaine et la reprise perpétuelle par le commencement aux vigiles du dimanche,
24. car les moines font preuve de par trop de paresse dans leur service de dévotion, quand ils psalmodient moins que le psautier, avec les cantiques accoutumés, en l'espace d'une semaine,
25. puisque nous lisons qu'une fois nos saints Pères accomplirent cela vaillamment en un seul jour. Tièdes que nous sommes, puissions-nous du moins nous en acquitter en une semaine entière !
Ces lignes de St Benoit sont une belle expression de sa liberté d'esprit. Conscient d'avoir lui-même fait des choix propres parmi d'autres cursus, celui de l'office romain, celui du Maitre, dans la distribution des psaumes pour les offices de la semaine, St Benoit ne veut pas imposer son choix. Il lui importe cependant que tous gardent la récitation du psautier en une semaine... Il serait intéressant ici d'étudier et de rechercher sur quel fondement théologique repose cette injonction que Benoit reçoit des moines d'Egypte. Avaient-ils la connaissance de la conviction juive que le psautier est un résumé de la Bible? Faisaient-ils un rapprochement entre la récitation en une semaine et la semaine de la création tendue vers le sabbat et le 8° jour ?
St Benoit retient quant à lui surtout l'aspect ascétique et moral. Réciter le psautier est une expression de l'art propre des moines. de leur service de dévotion. Ils se sont voués à louer Dieu en tout temps et à lui donner toute leur énergie. Faire moins que dire le psautier en une semaine serait pour lui faire preuve de« paresse>>. Ce mot« paresse »traduit« iners » en latin. Il signifie« étranger à tout art (in-ars)»,« sans activité»,« sans énergie». Célébrer moins que le psautier en une semaine serait manquer à son devoir, à l'art que les moines ont choisi d'exercer pour l'amour de Dieu: celui de le chanter en tout temps. Je retiens de cet avertissement de St Benoit, le sérieux qu'il attend de ses moines dans l'exercice de leur mission de prière. Nous pouvons toujours nous demander si parfois, dans notre service nous ne sommes pas un peu paresseux. Non pas tant parce que nous prions le psautier en deux semaines, mais davantage dans notre manière de nous impliquer dans l'office. Lorsque nous préférons ne pas chanter. .. lorsque nous n'avons pas nos feuilles, lorsque nous ne sommes pas appliqués à ce que l'on fait, nous habituant à faire des erreurs, lorsque nous ne prenons pas soin de nous faire remplacer lorsque nous sommes absents, sans nous assurer que le service sera bien accompli et par qui... Regardons un peu notre manière de célébrer l'office et la liturgie en général, et soyons attentifs pour ne pas nous installer dans une sorte de paresse où nous nous laissons porter par le courant, en oubliant que chacun, nous sommes responsables de ce qui se passe dans l'église. Comme nous le verrons dans les chapitres suivants, c'est le service du Seigneur qu'il nous revient d'honorer, notre art, célébré pour nous, pour toute l'église et pour l'humanité.