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HOMELIE

09 août
année 2019-2020

Année A - 19e dimanche TEMPS ORDINAIRE (A) (09/08/2020)
(1R 19, 9a.11-13a – Ps 84 – Rm 9, 1-5 – Mt 14, 22–33)
Homélie du F.Jean-Louis

Frères et sœurs, En plein cœur de l’été, les lectures de ce dimanche nous offrent un bel enseignement pour renouveler notre regard sur Dieu. Particulièrement la première lecture, tirée du premier livre des Rois qui raconte ici l’expérience d’Elie au mont Horeb, la montagne de Dieu, là où Dieu a donné sa Loi à son peuple. Ce texte est très intéressant car il peut nous faire prendre conscience de la vision qui nous habite peut-être d’un Dieu tout-puissant qui se révèlerait dans les forces de la nature. Les religions des peuples entourant Israël se situaient dans cette vision.
L’ouragan, le tremblement de terre, le feu sont des puissances telles qu’elles peuvent nous paraître dire qui est Dieu, combien grande est sa puissance. Et pourtant, déjà dans le Premier Testament, il nous est dit que ce n’est peut-être pas si évident que ça.
Et, surprise, c’est dans le murmure d’une brise légère (certains traduisent « la voix d’un fin silence ») que Dieu se révèle au prophète Elie.
Jadis, au peuple conduit par Moïse, Dieu s’était révélé dans un orage violent, avec un déchaînement des forces de la nature qui avait effrayé les Hébreux. Ici, il ne s’agit plus de montrer le Dieu d’Israël à l’égal voire surpassant les dieux païens mais de montrer qu’il est radicalement autre. Il se révèle dans une brise légère, dans presque rien. Et c’est ce Dieu là qu’Elie rencontre. Avouons qu’après près de 2000 ans de christianisme, il nous arrive encore bien souvent de croire que la Toute-puissance de notre Dieu est à l’égal des forces de la nature, quitte à être troublés ou plus encore, lorsque ce Dieu ne répond pas à nos demandes, à nos espérances immédiates. Comment Dieu peut-il permettre la pandémie actuelle s’il est vraiment tout–puissant ? La Bible ne donne pas de réponse intellectuelle à cette question mais, comme souvent, une réponse existentielle. Elie, fait l’expérience que Dieu est ailleurs de tout ce qui évoque spontanément la puissance pour nous. Il est dans une brise légère, dans la fragilité, dans la douceur mais qui fait du bien. C’est, il me semble, ce qu’évoque cette expression « brise légère ». Un vent doux qui rafraîchit.
Le psaume qui suit évoque de même un Dieu de paix, d’amour, de justice qui donne ses bienfaits.
Quant à l’évangile, il nous révèle Jésus qui ne se manifeste pas dans la tempête mais en vainquant la tempête et en calmant les eaux. Ce qui renvoie au ps. 106 : « Dans leur angoisse, ils (les marins pris dans la tempête) ont crié vers le Seigneur, et lui les a tirés de la détresse, réduisant la tempête au silence, faisant taire les vagues. »
Pour les Juifs, c’est une caractéristique de Dieu que de dominer le chaos des mers.
Mais ce passage nous révèle aussi Jésus qui sauve Pierre dans une situation critique. Situation critique d’ailleurs plus par manque de foi que par les éléments eux-mêmes. Il demandait à Jésus une preuve que c’était bien lui, mais il peine à y croire et s’enfonce… Il a dû sans doute passer d’une vision magique de Jésus à la foi.
Là aussi, l’évangile nous montre des apôtres qui doivent opérer un déplacement du regard qu’ils ont sur le Christ. Du prophète, ils constatent qu’il est le Fils de Dieu car il domine les éléments. Il ne se manifeste pas dans la tempête mais en calmant la tempête.
Que tirer aujourd’hui pour nous de ces passages ? Je vous propose quelques axes de réflexion tout en étant bien conscient qu’il peut y en avoir d’autres.
D’abord, nous avons toujours à corriger notre vision de Dieu et il nous faut être très prudents lorsque nous parlons de Dieu. Evitons de transformer notre vision de Dieu en dogme que tout le monde serait tenu de croire. La Bible nous montre différentes images de Dieu. Mieux, elle nous fait évoluer dans notre regard. Du Dieu tout-puissant, à la manière païenne qui se révèle dans les forces de la nature, elle nous fait passer à la vision d’un Dieu qui se révèle dans la douceur, la fragilité et cela culminera dans le Christ en croix dont les théologiens aujourd’hui n’hésitent pas à dire qu’il nous révèle l’amour du Père, et même la fragilité du Père. C’est le même Christ qui calme la tempête et qui agonise sur la croix renonçant à utiliser sa puissance à son profit. Frères et sœurs, il est essentiel de voir la Bible comme une lente découverte du visage de Dieu (et du visage de l’homme) qui se fait peu à peu. Et ce que l’Ancien comme le Nouveau Testament nous révèlent, c’est que, finalement, la toute-puissance de Dieu n’est pas là où nous pensons spontanément qu’elle est. Le pape François l’a très bien résumé dans une formule que je trouve, pour ma part fulgurante, : la Toute-puissance de Dieu, c’est sa miséricorde.
En sommes-nous vraiment convaincus du fond du cœur ? Il me semble que nous avons à méditer les Écritures afin de voir combien cette phrase du pape François, traduisant certainement une expérience personnelle, est aussi le reflet de l’enseignement biblique.
Prenons le temps de scruter la Parole de Dieu et de voir comment elle nous fait cheminer d’une vision d’un Dieu qui comblerait nos insuffisances, et qui est finalement décevant, à un Dieu dont la toute-puissance se manifeste dans sa miséricorde, sa capacité à nous accompagner dans les crises de nos vies, de notre monde. Cette miséricorde, nous la retrouvons dans le passage de l’épitre aux Romains qui est un bon antidote à tout antijudaïsme et à tout antisémitisme : « Ils sont israélites, ils ont l’adoption, la gloire, les alliances, la législation, le culte, les promesses de Dieu ; ils ont les patriarches, et c’est de leur race que le Christ est né. »
Avec de telles paroles, il ne nous est plus possible comme chrétiens d’être antisémite. Convertissons-nous à la miséricorde toute puissante de notre Dieu. AMEN

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