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HOMELIE
09 juilletannée 2016-2017
Année A - 14e dimanche ordinaire - 9 juillet 2017
Zacharie, 9, 9-10 Rom. 8, 9,11-13 Matt. 11, 25-30
Homélie du F.Ghislain
Dans l’évangile que nous venons d’entendre, Jésus nous invite : « Venez à
moi, vous qui peinez sous le poids du fardeau ». Tous, en effet, dans cette
église où nous sommes entrés tout à l’heure, nous peinons sous le poids d’un
fardeau. Chacun a le sien, fait de ses douleurs, de ses efforts coûteux, de
ses espérances déçues, de ses relations parfois difficiles, du poids aussi
de la souffrance du monde et de toutes les victimes qui le peuplent. Et ce
poids est parfois aggravé parce que nous sommes plus ou moins ce que
l’évangile appelle les « sages et les savants » : entendons que nous portons
sur les gens et les choses des jugements arrêtés, des convictions
inébranlables mais pas toujours fondées, nous subissons aussi des lois aussi
qui nous obligent sans que nous comprenions pourquoi…Le tout est comme une
sorte de corset plus ou moins étroit qui nous enserre, ne nous libère pas et
rend le fardeau plus lourd.
Or voici que Jésus nous invite au repos : « venez à moi, je vous procurerai
le repos, vous trouverez le repos pour vos âmes ». Entendons cette
invitation, ici, maintenant. La manière d’obtenir ce repos, il nous la dit :
« devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur ». Ici il nous
faut prendre le temps de regarder Jésus : la douceur et l’humilité ne sont
pas des attitudes qu’on puisse définir abstraitement. Il faut ouvrir les
yeux du cœur et les regarder, les contempler chez ceux qui en vivent. Jésus,
doux et humble de cœur. Le prophète Zacharie, dans la première lecture, nous
le montre « pauvre et monté sur un ânon » alors qu’alentour il y a des chars
de guerre et des chevaux de combat. Douceur de Jésus, douceur de l’évangile.
Celui-ci n’est pas une règle de vie facile, mais quand nous l’entendons
sortir des lèvres de Jésus, sourdre de son visage, il n’y a plus de dureté.
La Règle de saint Benoît, qui dessine un genre de vie plutôt austère, se
défend de rien imposer, dit-elle, de pesant ni d’âpre : il faut la prendre
en douceur, car elle vient de quelqu’un qui veut nous donner la vie. De
même, Jésus ne nous adresse-t-il pas alors une invitation à prendre notre
vie en douceur ? Et cette douceur ne va-t-elle pas guérir l’âpreté de notre
fardeau ?
Mais l’évangile va plus loin : la douceur de Jésus est une révélation de
Dieu. S’il nous invite à devenir ses disciples, c’est que Jésus veut nous
enseigner Dieu. Dieu, personne ne l’a jamais vu ; il demeure un Dieu caché.
Nous ne connaissons pas davantage le détail de son dessein sur le monde,
l’histoire, ni même sur la vie de chacun. Tout cela, c’est ce que l’Ecriture
appelle le Mystère ; c’est un livre scellé auquel nous n’avons pas accès. Un
seul pourtant connaît : le Fils qui est dans le sein du Père, qui est venu
parmi nous et ne désire rien tant que de nous révéler ce qui est caché. En
nous invitant à devenir ses disciples, Jésus veut nous introduire en Dieu,
nous le faire connaître ; mais il désire aussi nous faire comprendre ce que
nous échouons à expliquer, ce qui est plus fort que nous, ce qui parfois
nous scandalise, ce qui frôle l’insupportable. En nous proposant de regarder
sa douceur et son humilité, Jésus nous révèle à la fois le vrai visage de
Dieu et l’art de vivre en douceur dans un monde de violence, l’art de mettre
de la douceur aussi autour de nous.
Nous comprenons alors l’invitation à être des « tout-petits ». Cette
petitesse n’est pas de l’infantilisme. Elle est la racine encore fraîche et
souple de notre être le plus profond. Une sorte de disponibilité sans
condition où nous pouvons atteindre, qui permet d’accueillir sans calcul ce
qui advient, de « prendre tout en gré » comme ses voix le disaient à sainte
Jeanne d’Arc. Alors nous sommes mis sur le chemin de la connaissance de
Dieu, de la vision en Dieu des vicissitudes humaines, de ce que Jésus, qui
connaît le Père, veut nous révéler. Et il en résulte une proximité
respectueuse de tous les hommes, à commencer par les plus proches.
Avec cela, le fardeau avec lequel nous étions entrés dans l’église ne
disparaît pas. Le repos que veut nous donner Jésus comporte aussi un joug et
un fardeau : peut-être est-ce le même que tout à l’heure, mais n’a-t-il a
pas changé de sens ? Accueilli dans la douceur et l’humilité du Christ, son
poids s’allège et il ne blesse plus les épaules qui le portent.
Il me semble, frères et sœurs, que ce passage de saint Matthieu est comme la
quintessence de l’évangile, et en même temps le secret d’une vie, sinon
heureuse, du moins apaisée. Ne le laissons pas passer, mais offrons-nous à
lui. Allons à Jésus doux et humble de cœur, et entrons dans le repos qu’il
nous offre. - 9 juillet 2017