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HOMELIE

02 avril
année 2016-2017

Année A -5e dimanche de Carême, semaine (2 avril 2017)
Ez. 37, 12-14 Rom. 8, 8-11 Jean 11, 1-44
Homélie du F.Ghislain

Lorsque Jésus apprend la nouvelle de la maladie de Lazare, il a une réflexion inattendue : « cette maladie…servira à la Gloire de Dieu » et il précise : « c’est par elle que le Fils de Dieu doit être glorifié ». Que veut dire Jésus ? Pour le comprendre, il faut écouter la prière que Jésus adresse à son Père, juste avant de crier à Lazare de sortir du tombeau : « Père,… certes je savais bien que tu m’exauces toujours, mais j’ai parlé à cause de cette foule qui m’entoure, afin qu’ils croient que tu m’as envoyé » Ainsi, la Gloire de Dieu, c’est que soit reconnu le lien étroit entre Jésus et Lui. Jésus, - il le répète bien des fois dans l’évangile de saint Jean -, fait toujours la volonté de son Père, et le Père exauce toujours la prière de son Fils. Cet homme, qui vient d’arriver à la prière des sœurs de Lazare, il est en plein accord avec Dieu et Dieu trouve sa joie en Lui. Et pour manifester cette communion parfaite , Jésus va faire ce qu’aucun homme ne peut faire, si cela ne lui est donné d’En Haut : rendre la vie à un mort. La victoire de la vie, dont la sortie de Lazare du tombeau va être le signe, c’est le fruit de la communion entre le Père et le Fils : une communion faite de demande fidèle et de réponse totale. La manifestation de cette communion révèle le lieu de la Gloire de Dieu. Ou encore, ce que les gens voient, quand Lazare sort du tombeau, c’est la Gloire qui résulte de l’accord profond entre le Père et le Fils. Si Jésus dit à Marthe : « Je suis la Résurrection et la vie », cela lui est donné par son Père. Un homme ne peut pas ressusciter un mort, pas plus qu’il ne peut donner la vue à un aveugle, mais s’il demande de faire ces choses qui font triompher la vie et la lumière, cela lui est donné. Comme Jésus le dit ailleurs dans l’évangile : « Je suis venu pour qu’ils aient la vie et qu’ils l’aient en abondance ».Il me semble que, si nous nous bornions à regarder Lazare qui sort du tombeau, sans accueillir ce que ce signe révèle, l’union du Père et du Fils, nous manquerions le message essentiel de cet évangile.
Mais il y a encore davantage : ce Jésus, qui est « la Résurrection et la Vie »,et qui donne la vie à celui qui croit, il se manifeste aussi, à ce moment crucial, comme un homme sensible, fragile presque, en proie aux plus humains des sentiments. Alors qu’il s’approche de la tombe de son ami, il « frémit et se trouble », le texte nous le répète deux fois. Et finalement, il pleure. Au point que son amitié pour Lazare est évidente pour tous : « Voyez comme il l’aimait », et elle engendre une sorte de protestation : « Lui, qui a ouvert les yeux de l’aveugle-né, n’a pas été capable d’empêcher la mort de son ami ». Au moment de manifester la puissance qui lui vient de sa relation à son Père, le voici frémissant, désemparé, en pleurs. Personne n’a été plus homme que lui. Manifesté comme Fils de Dieu par, la résurrection dd Lazare, il se révèle un vrai Fils d’homme par la fragilité de sa tendresse. Il faut que les yeux de notre foi se portent ensemble sur ces deux aspects qui nous sont révélés.
Mais il y a encore autre chose : ce que nous venons d’entendre, et qui appelle notre contemplation, se passe à la veille des Rameaux. Il ne faudra pas une semaine pour que le Fils ne soit livré aux mains des pécheurs, qu’il ne soit flagellé, crucifié et qu’il ne meure, le cœur pris entre l’intense désarroi de l’abandon : « Pourquoi m’as-tu abandonné ? » et l’absolue persévérance dans le don : « Tout est consommé ». Thomas le disciple pressentait cela quand Jésus s’est mis en route pour Jérusalem et il a dit : « Allons nous aussi et mourons avec Lui ».

Qu’est-ce que nous pouvons faire de ce récit avec ses trois volets presque contradictoires ? Il nous faut d’abord, je crois, l’écouter. Puis le relire, le répéter. Le faire nôtre jusqu’à ce qu’il entre en nous, qu’il nous pénètre, comme dit saint Paul, à la jointure de l’âme et de l’esprit. Dans le discours après la Cène, Jésus, un peu déçu, dit à un de ses disciples : « Depuis si longtemps je suis avec vous et vous ne m’avez pas connu ». Prenons donc le temps de connaître le Christ, dans la gloire de sa Divinité échangée avec le Père. Dans son exquise sensibilité d’homme qui sait aimer, frémir, trembler, pleurer. Dans le trouble d’un être abandonné dans son attente, précipité dans la mort alors qu’il voulait donner la vie, et qui se garde pourtant fidèle. Connaître Jésus ainsi, c’est se disposer à recevoir la vie, moment après moment, à ressusciter.
Prenons aussi le temps de nous connaître nous-mêmes, - chacun de nous. Ce qui nous semble le plus évident peut-être, c’est l’épreuve : nos attentes déçues, nos sensibilités éprouvées, nos échecs sensibles. Mais l’évangile d’aujourd’hui nous invite à aller plus profond, à ne pas rester à la surface de nous-mêmes, à rejoindre cet espace caché en nous dont il faut retrouver le chemin : là où Dieu fait alliance avec nous, là où nous répondons à sa Parole. Chacun de nous a son espace de gloire : le tout est de s’y rendre et, autant que cela nous est donné, y demeurer. Alors, nous aussi, sans le savoir peut-être et ce sera mieux ainsi, nous donnerons la vie en abondance. Prenons enfin le temps de progresserons dans la connaissance vraie des autres. Eux aussi, - chacun sans exception -, a son jardin secret, sa justice incorrompue, sa relation vive avec lui-même et un Dieu que, peut-être, il ne peut pas nommer. Eux aussi ont leur sensibilité d’homme ou de femme. Eux aussi sont en proie à des blessures inguérissables. Eux aussi donnent parfois, souvent, très souvent la vie à qui sait les accueillir.

Prions, mes frères, les uns pour les autres, afin qu’en Jésus la vie revienne dans notre monde de mort. (2 avril 2017)

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