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HOMELIE

25 décembre
année 2016-2017

Année A - NOËL 2016 Messe du Jour
Hébreux 1, 1-6 Jean 1, 1-18
Homélie du F.Ghislain

Fêter Noël malgré tout. Ne serait-il pas plus juste de dire : Fêter Noël à cause de tout.

A cause de la naissance de Jésus comme elle s’est passée, ainsi que l’Evangile nous l’a rappelé cette nuit. L’occupant romain avait décidé de faire un recensement, sans doute pour avoir un état complet des gens qui paieront l’impôt. L’administration avait prévu que chacun irait s’inscrire dans son lieu d’origine, et voici qu’il y a eu des quantités de gens sur les routes. Dans les villages, les arrivants ne trouvent pas tous à se loger et ce sont évidemment les plus pauvres qui sont laissés dehors. Il a même fallu que les femmes, qui en général ne comptent pas selon le droit romain, se déplacent aussi. Joseph et Marie sont pris dans cet exode. Peut-être cela a-t-il hâté l’accouchement, après la fatigue du voyage et l’impossibilité de s’installer quelque part.

Comment cela s’est-il passé ? Très bien, probablement. Je pense à ce que disait le livre de l’Exode sur les femmes juives, qui sont tellement vigoureuses qu’elles n’ont pas besoin de sages-femmes pour accoucher. On voit d’ici Marie, rassurant Joseph préoccupé de ne pas trouver un endroit convenable : « Ne t’inquiète donc pas, c’est moi que cela regarde et je t’assure que cela se passera très bien ». Et, de fait, l’enfant naît, elle le voit pour la première fois, elle le caresse, elle l’embrasse, elle le lange ; quelque chose s’échange entre elle et lui, au travers des yeux peut-être encore fermés du tout petit. Une naissance bien réussie, une relation déjà forte et qui ne cessera pas. La puissance, la beauté, la douceur de la vie. Et cette expérience belle, Marie la vit sur le fond de la prophétie qu’elle a entendue quelques mois auparavant : ce nouveau-né dans la crèche, ce fils formé de son sang et de sa chair, est « Fils du Très-Haut, promis au trône de David, saint, et on l’appellera Fils de Dieu ». Et voici que des bergers du voisinage s’agglutinent à la porte pour voir l’enfant, car eux aussi ont entendu un message inouï : ce nouveau-né est Sauveur, Messie, Seigneur. Sauf Marie et Joseph, personne ne le sait, et pourtant c’est vrai : le salut est au milieu de la tourmente, et les pauvres s’en aperçoivent. Les textes de la Messe de Jour disent alors la même chose, mais cette fois-ci, en partant de Dieu et non pas des hommes. En Dieu aussi, il y a une naissance, celle-ci éternelle, et le Fils qui est sans cesse engendré est « reflet resplendissant de la gloire du Père, expression parfaite de son être ». Entièrement distinct et tout semblable, engendré et tourné vers Celui qui l’engendre. Un Esprit commun circule entre eux. Et il a plu à Dieu que cette naissance éternelle déborde en quelque sorte vers ce qui n’est pas encore : dans le Fils éternellement engendré sont créés les mondes et les temps, et le Fils vient en ceux-ci afin de les inclure dans sa relation au Père, dans la circulation de l’Esprit. Et il y vient intensément non à la surface ou en les surplombant, mais comme un homme, en homme : « Tu m’as formé un corps » dit Jésus à son père en entrant dans le monde, au témoignage de la lettre aux Hébreux. Et comme un homme qui va souffrir comme tout le monde, plus que tout le monde : il ne sera pas reçu, il ira jusqu’à la mort. Puis il ressuscitera et sera alors, mais alors seulement, proche de tous et sauveur de chacun.

Voilà pourquoi il faut célébrer Noël. Nous ne pouvons pas regarder le monde présent et surtout les hommes réels, les femmes réelles, les enfants réels qui l’habitent, avec ce cortège insupportable de luttes, de souffrances physique et morale, de tragédies qui englobent des populations entières, comme si Jésus, le Fils du Très-Haut, le Fils de Dieu n’y était pas venu, comme s’il ne demeurait plus parmi nous. En fait, nous le voyons bien, il est notre seule espérance. Qu’est-ce qui maintient le monde, sinon les gens qui, croyant que le bien est plus fort que le mal et qu’il y a donc toujours quelque chose à faire là où on est, se mobilisent, dans la prière d’abord qui met et maintient en contact avec Dieu, et dans l’action, quelle qu’elle soit, avec les autres et pour les autres, afin que la vie soit plus forte ? Et nous, chrétiens, nous croyons ce dynamisme plus fort que le mal vient justement de la présence parmi nous de l’Esprit d’amour et de fraternité que Jésus, qui est venu parmi nous, a vécu, est mort et ressuscité ne cesse d’envoyer aux hommes.

Célébrer la naissance de Jésus, c’est faire triompher en nous l’Espérance alors même qu’il n’y a pas beaucoup de signes positifs dans la manière dont vit le monde. Masi c’est aussi discerner ces signes positifs là où ils se trouvent, au milieu des plus grandes misères. C’est enfin s’engager, là où nous sommes, pour construire une société meilleure. Là où nous sommes : les frères dans cette communauté, les familles auxquelles nous appartenons, les entreprises où nous travaillons ou le chômage que nous subissons, les liens que nous cherchons à créer, les associations auxquelles nous participons. Marie et Joseph ont fait face à la situation à Bethléem. Dieu dans le ciel ne cesse de donner son Fils. En célébrant Noël et en vivant Noël là où nous sommes, nous faisons advenir le salut.

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